L'énorme réacteur à fusion nucléaire ITER entame son assemblage

Le réacteur à fusion nucléaire ITER © 2020 ITER

Le réacteur à fusion nucléaire ITER © 2020 ITER

L’assemblage d’ITER, le réacteur géant à fusion nucléaire, a démarré le 28 juillet 2020 en France. Ce projet, le plus ambitieux jamais entamé dans le domaine de la coopération scientifique internationale, est suivi de près au Swiss Plasma Center de l’EPFL, l’un des principaux laboratoires de recherche sur la fusion au monde.

C’est un moment clé dans l’histoire d’ITER, le plus grand projet international de fusion nucléaire. La phase d’assemblage du réacteur géant, le tokamak mesurant 30 mètres de diamètre et 30 de hauteur, a été lancée le mardi 28 juillet 2020 à Cadarache, dans le sud de la France. L’événement a réuni les hauts responsables des 35 pays partenaires du projet: les Etats de l’Union européenne (plus la Suisse), la Chine, la Corée du Sud, les Etats-Unis, l’Inde, Le Japon et la Russie. ITER suscite un grand espoir à l’échelle de l’humanité: celui de fournir une énergie électrique propre, sans déchets radioactifs sur le long terme ni émissions de CO2. Dans un message vidéo, le président français Emmanuel Macron a évoqué «une prouesse scientifique et technologique» qui «renoue avec cette idée que grâce à la science, demain sera peut-être meilleur qu’hier».

Energie du futur sans déchets radioactifs à long terme

Si elle suscite l’engouement, c’est que contrairement à la fission nucléaire à l’œuvre dans les centrales actuelles, la fusion ne provoque pas de rejets radioactifs à long terme. Le procédé consiste à chauffer des noyaux d’hydrogène à environ 150 millions de degrés, soit dix fois la température du soleil. En fusionnant à l’intérieur d’un plasma, les noyaux génèrent une grande quantité d’énergie, et libèrent de l’hélium, non radioactif. L’un des principaux défis de la recherche consiste à maintenir les conditions de la fusion, soit une température d'une centaine de millions de degrés, sur une période prolongée, dans une enceinte à vide. ITER permettra pour la première fois de tester la faisabilité de la fusion dans un réacteur géant. Et, in fine, de voir comment le plasma peut produire plus d’énergie qu’il n’en consomme.

A Cadarache, le 28 juillet 2020, une poignée de journalistes et de scientifiques ont pu faire le tour du site d’ITER, guidés par le directeur général du projet, Bernard Bigot. Le grand public a pu assister à cette visite online. Pendant la conférence de presse qui s’en est suivie, Bernard Bigot a souligné les défis scientifiques d’ITER et appelé à la patience. L’assemblage prendra cinq ans. En tout, la machine sera dotée de quelque dix millions de composants provenant des 35 pays partenaires. ITER devrait produire les premiers plasma-tests à fin 2025. Ensuite les dernières pièces du puzzle seront installées et les différents scénarios d'expériences développés. Il devrait ainsi être prêt pour fonctionner à sa puissance maximale en 2035.

Le Swiss Plasma Center de l’EPFL en première ligne

L’assemblage d’ITER constitue aussi un moment phare pour les scientifiques du Swiss Plasma Center (SPC) de l’EPFL, l’un des principaux laboratoires de recherche sur la fusion au monde. Il abrite son propre tokamak, TCV, depuis 1992. Il s’agit peu ou prou d’une version miniature du réacteur ITER actuellement en assemblage. Le SPC étudie le plasma et les manières de le chauffer et de le confiner. Des connaissances importantes pour le projet ITER, avec lequel le laboratoire de l’EPFL entretient des échanges scientifiques réguliers. Il contribue également, depuis plusieurs années, au design du système de chauffage du plasma par micro-ondes de ITER.

Voir la fusion se réaliser, avec l’espoir d’une production d’énergie propre et presque infinie dans le futur, constitue le but ultime de nombreux chercheurs du SPC. « On est arrivés à la fusion nucléaire avec l’espoir de voir cette production de notre vivant, de manière un peu idéaliste », souligne Yves Martin, physicien au Swiss Plasma Center et adjoint du Directeur. C’est peu dire que les résultats d’ITER seront suivis de près.