Des protéines qui s'étendent au-delà du répertoire de la nature

© 2020 EPFL

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Des scientifiques de la faculté des sciences et techniques de l’ingénieur ont développé une nouvelle méthode de calcul pour concevoir des protéines artificielles avec des fonctions qui ne se trouvent pas dans la nature.

Les protéines naturelles sont les rouages de la vie. Cependant, elles ont été modifiées par l'évolution pour des tâches très spécifiques liées à la survie de leurs organismes hôtes. Au-delà des protéines naturellement évoluées, il existe un vaste univers de protéines dont nous ne pouvons qu'imaginer les applications potentielles. « Prenez des Lego que l’on assemble afin de construire une voiture. Au laboratoire de conception de protéines et d’immuno-ingénierie, nous faisons la même chose, mais avec des protéines », déclare Fabian Sesterhenn, ancien doctorant du laboratoire. Après avoir créé des protéines en guise de vaccins contre le virus respiratoire syncytial (VRS), l’équipe du professeur Bruno Correia a de nouveau utilisé la conception informatique pour fabriquer des nouvelles protéines fonctionnelles, mais pour des applications différentes. La recherche est publiée dans Nature Chemical Biology

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La conception classique (top down approach) consiste à sélectionner des protéines naturelles et de les reconcevoir afin de leur donner des nouvelles applications. « En résumé, nous réutilisons les protéines qui existent dans la nature », explique Che Yang, également ancien doctorant du laboratoire. Cette fois-ci, les chercheurs ont utilisé une approche dite ascendante (bottom up approach). Au lieu de travailler avec des protéines naturelles, ils ont assemblé leurs éléments constitutifs à l'aide d'un programme informatique, qui peut simuler jusqu'à plusieurs milliers de combinaisons possibles. « Nous avons testé plusieurs de ces modèles en laboratoire et retenu qu’une petite sélection remplit les critères », complète le doctorant. 

Détection des anticorps antiviraux

Cette méthode s’avère efficace pour concevoir des nouvelles protéines fonctionnelles. Mais ces protéines de novo, nouvellement synthétisées, peuvent faire office de biocapteurs, ce dont les protéines naturelles ne sont pas capables. « Une application pour laquelle nous avons utilisé ces protéines est celle de biocapteur pour détecter des anticorps antiviraux particuliers dans le sang », explique Che Yang. 

Travail collaboratif 

De plus, les protéines de novo, conçues par Che Yang et ses collègues, ont la possibilité de contrôler la signalisation des récepteurs qui se situent à la surface d’une cellule. « Leur fonction principale est de donner des informations sur l’environnement. Avec les protéines on peut activer ou désactiver ces récepteurs spécifiques », explique Che Yang. 

Ces deux applications ont été développées en collaboration avec les laboratoires de Martin Fussenegger, de l’ETH Zurich et de Maarten Merkx, de l’université d’Eindhoven aux Pays-Bas.

Au cours des milliards d'années d'évolution, la nature a créé plusieurs millions de protéines essentielles au fonctionnement des systèmes vivants. « Maintenant, notre technologie nous permet de nous rapprocher un peu plus des procédés naturels en utilisant la conception des protéines pour créer nos propres protéines fonctionnelles. Dans un avenir proche, nous pourrons probablement créer de nombreuses autres protéines qui peuvent avoir un impact sur notre vie quotidienne", conclut Bruno Correia.

Financement

The computational simulations were facilitated by the CSCS Swiss National Supercomputing Centre as well by SCITAS at EPFL. This work was supported by the Swiss initiative for systems biology (SystemsX.ch), the European Research Council (Starting grant - 716058), the Swiss National Science Foundation (310030_163139), the NCCR Molecular Systems Engineering and the NCCR Chemical Biology. F.S. was supported by an SNF/Innosuisse BRIDGE Proof-of-Concept grant, and J.B. was funded by the EPFL Fellows postdoctoral fellowship. T.K. received funding from the Cluster of Excellence RESIST (EXC 2155) of the German Research foundation and from the German Center of Infection Research, J.T.C. was supported by the ERA-Net PrionImmunity project 01GM1503 of the German Federal Ministry of Education and Research.