Des protéines font la lumière sur le cristallin

Seule partie du corps transparente, le cristallin est composé de protéines qui recèlent encore de nombreux mystères. Les résoudre, c’est comprendre à terme l’œil et ses maladies, telle que la cataracte. L’équipe de Giuseppe Foffi étudie les propriétés physiques de notre lentille naturelle. Leurs avancées viennent d’être publiées.


Le cristallin peut être affecté par la cataracte, une perte totale ou partielle de sa transparence. Il est composé d'une solution de protéines très denses. Ces protéines sont de tailles différentes, se lient entre elles en fonction de la force de leur interaction, et garantissent la transparence de l’œil. Giuseppe Foffi et ses co-équipiers ont supposé qu’il existe également une faible interaction entre les différents types de protéines et non seulement entre celles d’un même groupe. Ils viennent de le démontrer théoriquement et expérimentalement par des simulations.

Des mutations des protéines, dues à la génétique, au diabète ou aux UV causent la cataracte due à l’âge. Le cristallin ne se renouvelle plus une fois formé. Il est donc crucial de comprendre les propriétés de ses protéines pour déterminer comment certaines maladies l’affectent. L’espoir est de soigner en amont et non de pallier aux effets de façon insatisfaisante. Bien que facilement opérable dans nos pays, la cataracte est la première cause de cécité dans le monde.

Une cataracte froide

Le cristallin peut également devenir opaque en fonction de la température. Une baisse de celle-ci change les propriétés des protéines qui ne laissent alors plus passer la lumière. Ce phénomène réversible, appelé "cataracte froide", permet de comprendre les interactions entre les molécules et les mécanismes de la cataracte de l’âge.

Giuseppe Foffi, Nicolas Dorsaz (ancien doctorant, Université de Cambridge), George Thurston (Rochester Institute of Technology), Peter Schurtenberger (Université de Lund) et Anna Stradner (Université de Fribourg) ont utilisé des protéines extraites de cristallins bovins et refroidies pour mener les expériences et prouver les hypothèses sur l’interaction entre les types de protéines. Pour sonder les lentilles devenues opaques, ils ont utilisé des rayons X et des neutrons. Les résultats ont montré que la valeur de l’interaction, très faible, confirme les simulations et est nécessaire à la transparence de l’œil. L’équipe va maintenant s’atteler à faire de même avec le dernier type de protéine, le moins connu.

Au-delà des perspectives de recherches et de compréhension de l’œil et de ses pathologies, Giuseppe Foffi s’enthousiasme. « Je n’ai eu que deux fois dans ma vie un moment pareil où la théorie prédit des résultats expérimentaux. » Et même si les applications peuvent paraître encore lointaines, il rappelle qu’ « avant d’inventer la radio, il a fallu découvrir les équations l’électromagnétisme. »


Liens :
http://gr-fo.epfl.ch/

http://pubs.rsc.org/en/Content/ArticleLanding/2011/SM/c0sm00156b


Auteur: Nicolas Guérin

Source: EPFL