Démonter des appareils du quotidien pour mieux intégrer la théorie

Mettre les mains dans les rouages, dévisser les éléments, découvrir les fonctionnalités, éparpiller les pièces, émettre des hypothèses. Grâce au cours d’ingénierie inversée, les étudiant⸱e⸱s entrent dans le corps de l’objet pour en saisir les mécanismes.


Depuis 2018, des volées de quelque 150 étudiantes et étudiants de 3ème année Bachelor en microtechnique peuvent relier leurs connaissances théoriques à des observations pratiques grâce à un cours ludique appelé « reverse engineering ». Ils commencent par choisir un objet du quotidien, un rasoir électrique, un ventilateur, une bouilloire, un moulinet de pêche, un toaster ou un dérailleur de vélo puis le démontent complètement. En explorant les composants, la façon dont l’objet a été construit, les éléments connectés, leurs fonctionnalités, cela leur permet de comprendre graduellement les processus de construction.

L’apprentissage par la pratique, se révèle une méthode très efficace comme le constate avec plaisir le professeur Yves Bellouard qui a créé ce cours. « Il y a une certaine appétence des étudiantespour des cours avec un projet concret. La partie d’ingénierie inversée permet de mieux faire apprécier l’étude des procédés de fabrication qui, autrement, peut sembler un peu indigeste avec son catalogue de procédés. »

Découvir les secrets de fabrication d'un rasoir électrique © Alain Herzog 2021 EPFL

Un plaisir partagé

Désassembler les objets est une tâche qui plait aux élèves comme au professeur, car lui aussi découvre des secrets de fabrication. En examinant à leurs côtés ce que les objets ont dans le ventre, il est en mesure de leur donner des conseils sur la méthodologie à suivre afin de comprendre leur fonctionnement, de déceler les matériaux utilisés, de faire des hypothèses, de les tester en les modélisant et de vérifier si leurs observations sont correctes. « C’est un moyen très efficace d’avoir des étudiantes et étudiants engagés et motivés d’apprendre par eux-mêmes comment les choses sont faites en réalité, de remarquer quels sont les aspects importants et comment les technologies sont utilisées », précise Yves Bellouard.

Nadia, Aziz et Brahim ont choisi de désosser un stéthoscope, objet bien plus mystérieux qu’il n’y parait, notamment avec sa membrane intégrée dans « le pavillon », la pièce métallique ronde que l’on pose sur le torse des patients. « Cela nous permet d’appliquer tout ce que l’on a vu pendant les deux premières années, la science des matériaux, les méthodes d’usinage, il y a même des aspects qui portent sur l’électronique. On a pu découper le pavillon par électroérosion pour voir comment il était fabriqué », explique Aziz Belkhiria.

Nadia, Aziz et Brahim ont choisi de désosser un stéthoscope © Alain Herzog 2021 EPFL

Même si ce cours donne un peu de légèreté à l’apprentissage, il compte pour 40% dans la note finale. « À l’issue du semestre, les étudiantesdoivent pouvoir expliquer en totalité l’objet qu’ils ont expertisé, nous leur demandons même de proposer des alternatives, entre autres pour les sensibiliser à la durabilité, mais aussi pour stimuler leur créativité », conclut Yves Bellouard.

De quoi se compose un métronome? © Alain Herzog 2021 EPFL

Au-delà des projets interdisciplinaires MAKE, le Discovery Learning Program ambitionne de favoriser l’intégration de l’apprentissage par la pratique au travers du curriculum des étudiantes. En permettant un apprentissage graduel et intelligemment orchestré, au fil du parcours académique, les DLL aident à renforcer les acquis pédagogiques et participent à la qualité de l’enseignement.

Ce cours d’Yves Bellouard fait partie des exemples de cours remarquables et qui illustrent les possibilités offertes. En étroite collaboration avec le CAPE et le Centre LEARN, ces approches contribueront à une meilleure compréhension des méthodologies pédagogiques qui peuvent être déployées pour favoriser des apprentissages de qualité.