Comprendre l'origine de l'eau © 2011 EPFL
Le laboratoire de mécanique des fluides de l’environnement (EFLUM) lance une grande campagne de mesure dans le Val Ferret afin de collecter des données essentielles sur l‘influence de l’environnement sur le débit des torrents.
La prévision des risques naturels est aujourd’hui un défi majeur pour pouvoir informer et surtout protéger les populations installées dans des zones à risque. «Des modèles mathématiques existent mais ils ne prennent pas encore en compte toutes les données nécessaires à l’établissement de prédictions fiables, comme l’influence de la température ambiante, la formation des vents thermiques ou l’impact des précipitations,» explique le professeur Marc Parlange. Ainsi, le projet né en 2008 avec une seule station météo s’est étoffé pour aujourd’hui, s’étendre sur 20 km2 et couvrir la plus grande partie du bassin versant. Mais travailler en montagne demande des aptitudes particulières. Les stations météo sont installées dans des endroits stratégiques et improbables dans une vallée qui compte entre 800 m à 1000 mètres de dénivelé. Pour l’anecdote, il y a beaucoup d’alpinistes dans le laboratoire de Marc Parlange : «Mener des campagnes dans des régions montagnardes est très physique. Les doctorants qui travaillent ici sont des sportifs.»Trouver le torrent idéal Ce n’est pas un hasard si les recherches menées par l’EFLUM se concentrent au Val Ferret, Raphaël Mutzner assistant-doctorant en charge de la modélisation hydrologique, n’avait pas l’embarras du choix. «La condition était de trouver un torrent qui ne subissait pas encore l’influence des humains, donc s’assurer qu’aucun barrage ne modifiait son débit, et chose étonnante, il a été très difficile de le dénicher même en étendant nos recherches dans toute la Suisse. La Dranse de Ferret est idéale, elle s’écoule librement dans une petite vallée encore sauvage dont la rive droite du bassin versant est caractérisée par des pentes douces et la gauche par des flans rocheux et escarpés. Un petit glacier est présent dans la partie haute.» Lors de cette nouvelle campagne, Raphael Mutzner va prélever de la glace et de l’eau souterraine, précédemment il avait recueilli également de la neige, des prélèvements qui permettront de déterminer la signature isotopique de la Dranse de Ferret et pouvoir quantifier précisément l’influence de ces diverses sources sur le torrent.
Par vents et par monts Mais l’influence hydrique n’est pas le seul élément en cause dans la fluctuation du débit du cours d’eau, Daniel Nadeau assistant-doctorant, étudie aussi les vents : «Je cherche à comprendre les vents de pente, leur montée le jour et la descente la nuit. Comment se forment-ils, à quel moment ? Quelle est leur incidence sur l’évaporation de l’eau ? Mon but est de pouvoir prédire ces vents dans le modèle.» De nombreux outils seront déployés cet été. Ainsi pour collecter les informations à différentes hauteurs, outre les 25 stations au sol équipées de nombreux capteurs, deux tours météorologiques, logées sur des mâts de 10 mètres, seront installées dans la vallée, un ballon sonde sera déployé ponctuellement et grâce à trois Lidars, appareils de détection par laser, les chercheurs seront capables de connaître les vents en continu sur près de deux kilomètres de hauteur. «Comprendre l'hydrologie des Alpes permet de mieux gérer les risques qui font partie intégrante de cet environnement majestueux» conclut Marc Parlange.