Campus Energypolis 1/6, du laboratoire à l'économie réelle

© 2021 EPFL

© 2021 EPFL

En investissant 409 millions de francs, le canton du Valais en collaboration avec la Ville de Sion souhaitent accélérer le transfert de technologies de la recherche fondamentale et appliquée vers le tissu économique valaisan. Description du fonctionnement de cette chaîne de valeurs.
Une fois par semaine, jusqu’au 24 février, le campus se dévoile dans Le Nouvelliste. Découvrez-y les acteurs qui y évoluent, ainsi que les solutions de demain qui y sont développées.

Voir l'article complet dans Le Nouvelliste.

Le «time 2 market». C’est ainsi que l’on dénomme les étapes nécessaires à transformer l’idée d’un chercheur dans son laboratoire en un bien commercialisable. Le Campus Energypolis vise à accélérer ce processus en rassemblant, à quelques mètres de la gare de Sion, les trois acteurs-clés de cette chaîne de valeurs : l’EPFL Valais Wallis, la Haute Ecole d’Ingénierie (HEI) de la HES-SO Valais-Wallis et la fondation The Ark via son bras opérationnel Cimark.
Si les trois organisations interviennent à chaque étape, chacune dispose d’une expertise renforcée dans certains domaines. Les chercheurs de l’EPFL sont ainsi spécialisés dans la recherche fondamentale. C’est dans leur laboratoire qu’ils imaginent les innovations de demain. Qu’ils tâtonnent jusqu’à obtenir un résultat qu’ils n’avaient jusque-là imaginé qu’en théorie. Par exemple, le laboratoire du Dr. Jan Van Herle a développé une pile à combustible réversible, capable de stocker de l’énergie sous forme de gaz et de réutiliser ce dernier plus tard pour créer de l’ électricité .

Rendre l’invention commercialisable

Mais une fois ce premier prototype développé, il faut pouvoir s’assurer de son fonctionnement dans des conditions réelles. Cela implique de connecter cette pile à une source de production d’énergie comme par exemple à des panneaux photovoltaïques installés sur une toiture. Mais comment le faire ? Des questions pratiques auxquelles les professeurs de la HEI sont particulièrement bien placés pour répondre.
Cette étape de recherche appliquée permet de développer des prototypes fonctionnels. Il reste ensuite à les tester sur le marché (pré-industrialisation) avant de pouvoir les commercialiser. Des étapes pour lesquelles la fondation The Ark et Cimark jouent un rôle primordial. Ceux-ci accompagnent les futures start-up, en leur proposant un coaching, un soutien financier et la mise à disposition d’infrastructures.
Par ailleurs, le Campus Energypolis est membre du réseau «Switzerland Innovation Park Network West EPFL (SIP Network West EPFL)». Celui-ci relie les différents sites de l’EPFL (voir encadré) et promeut sur le plan national et international les découvertes innovantes de chaque membre.

Les cinq questions que tout le monde se pose 

1. Pourquoi les collectivités publiques ont-elles investi 409 millions de francs dans ce projet ?

Le Campus Energypolis a pour vocation de mettre en lumière les compétences présentes en Valais. Contrairement à l’image traditionnelle, le Valais est une région fortement industrialisée avec une spécialisation dans le domaine de la chimie, de la métallurgie et de l’énergie.
La présence de l’EPFL s’est dessinée sur la base de défis majeurs auxquels l’humanité sera confrontée : transition énergétique et mobilité, réchauffement climatique et pollution, vieillissement de la population. Le premier pôle de recherche touche au domaine de l’énergie partant de la chimie (énergie renouvelable, stockage, récupération du CO2). En créant un écosystème favorable à l’innovation, les pouvoirs publics souhaitent ainsi faire bénéficier les entreprises régionales des technologies développées au sein du Campus afin de créer des emplois à haute valeur ajoutée. L’objectif est de faire du Valais l’un des cantons les plus attractifs et les plus compétitifs de Suisse en termes d’innovation, mais aussi à l’échelle internationale. Pour y arriver, le Grand Conseil a aussi adopté, en 2020, une loi fiscale très favorable pour les entreprises innovantes, qui sont notamment exonérées d’impôts pendant leurs cinq premières années d’existence.

2. Quelles sont les retombées économiques pour le Valais ?

Il est actuellement compliqué d’articuler un chiffre précis, la construction du Campus Energypolis se poursuivant. Le retour sur investissement le plus immédiat concerne les 230 collaborateurs de l’EPFL Valais Wallis, qui résident en Valais pour 71 % d’entre eux. Des nouveaux résidents qui paient leurs impôts (près de deux millions de francs par année) et consomment dans la région.
C’est sans compter l’impact de l’écosystème d’innovation sur l’économie locale. En effet, les 12 start-up déjà créées autour du Campus Energypolis ne travaillent pas toutes seules dans leur coin. Elles cherchent à collaborer avec des partenaires privés déjà installés sur un marché et désireux d’investir dans leurs projets innovants. Les entreprises locales qui souhaitent de participer auront l’avantage de pouvoir lever plus facilement des capitaux, profitant notamment, à l’échelle nationale et internationale, du prestige de l’EPFL. Depuis 2014, l’EPFL Valais Wallis a ainsi levé 85 millions de francs auprès de tiers. Une somme qui a en grande partie était dépensée en Valais. Le Campus, bénéficiant de la visibilité et du réseau de l’EPFL, permet ainsi d’attirer en Valais des bailleurs de fonds et du capital-risque. 
De plus, la présence de start-up et entreprises technologiques innovantes signifie également création d’emplois, ainsi que le maintien et la mise à disposition en Valais de compétences et de savoirs spécifiques.

3. Quelles sont les autres retombées pour le Valais ?

Mohammad Khaja Nazeeruddin. Le nom n’est pas forcément très connu du grand public. Mais il représente peut-être l’une des plus formidables cartes de visite pour le Campus Energypolis. Et pour cause : il a été désigné en 2017 parmi les cinq chercheurs les plus influents du monde pour son travail sur un nouveau type de cellules photovoltaïques, déjà cité dans des dizaines de milliers d’articles scientifiques.
À l’instar du Professeur Nazeeruddin, ils sont plusieurs chercheurs internationaux de grande qualité à avoir atterri à Sion. Leur présence participe à la construction de la réputation de l’EPFL Valais Wallis. Une image utile pour trouver des financements, mais aussi pour faciliter de nouvelles collaborations internationales avec des acteurs de renom et attirer des chercheurs venant des quatre coins du monde. De quoi donner au Valais un visage un peu plus diversifié et de faire davantage connaître la région à l’international. On imagine bien, à ce titre, que le rooftop du campus et son panorama à 360 degrés sur la Vallée du Rhône, devienne le passage obligé pour tous les chercheurs invités. De quoi les convaincre de prolonger leur séjour dans la région ?

4. À quelles problématiques concrètes les chercheurs répondent-ils ?

Les activités du Campus s’orientent sur les recherches dans les domaines de l’énergie, de l’environnement et de la santé. La géographie du canton offre par exemple un terrain de jeu privilégié pour ceux qui souhaitent comprendre et prédire les impacts induits par le climat sur l’environnement. Les environnements de haute altitude et latitude sont extrêmement sensibles aux changements climatiques. ALPOLE (pôle de recherche sur l’environnement alpin et polaire), constituante de l’EPFL Valais Wallis, permettra d’étudier et de concevoir des stratégies pour atténuer ou s’adapter à ces impacts. Le climat est aussi la préoccupation principale des laboratoires de chimie verte, qui recherchent de nouvelles manières de capter, d’utiliser et de valoriser le CO2.
La transition énergétique et ses enjeux sont aussi au cœur des réflexions des chercheurs de l’EPFL Valais Wallis et de la HEI. Par exemple, comment les gestionnaires de réseaux électriques vont-ils pouvoir gérer une production d’énergie (renouvelable) de plus en plus décentralisée, plutôt que par le biais d’énormes centrale.
Du côté de la CRR-SUVA, les chercheurs de l’EPFL travaillent sur les neuroprothèses, alliant à la fois les techniques de la robotique et des neurosciences. En profitant de la proximité de la Clinique romande de réadaptation et l’Hôpital du Valais, leurs recherches se concentrent sur la réhabilitation motrice assistée, notamment pour les para- et tétraplégiques, les personnes amputées et celles dont certains membres sont paralysés suite à des accidents vasculaires cérébraux.

5. Combien de collaborations impliquent l’EPFL ?

25 projets de recherche communs sont actuellement en cours entre des professeurs de l’EPFL et de la HES-SO Valais-Wallis. Une majorité concerne évidemment la Haute école d’Ingénierie. Mais pas tous. Ils concernent aussi la santé. Le nombre de collaborations dans ce domaine devrait encore sensiblement augmenter avec la construction du Pôle Santé à Sion. Le nouveau campus, pour lequel le Canton investit près de 72 millions de francs, accueillera les étudiants de la Haute école de Santé, ainsi que des laboratoires de l’EPFL et des locaux destinés à la fondation The Ark. À noter que la plupart de ces projets de recherche impliquent généralement d’autres universités et/ou des acteurs privés ou publics.
À terme, les collaborations avec l’école polytechnique devraient de plus en plus sortir des laboratoires. C’est déjà le cas par exemple pour la cafétéria du Campus Energypolis. Comme l’ensemble des cantines de la HES-SO Valais-Wallis, tant à Sion qu’à Sierre, elle bénéficiera du concept de restauration développé par l’EPFL. 

Retrouvez la semaine prochaine : 
Campus Energypolis — 2/6 : L'EPFL Valais Wallis

Energypolis : un pôle collaboratif



EPFL
Valais Wallis

A-t-on encore besoin de présenter l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, régulièrement citée parmi les meilleures institutions de science et de technologie au monde ? L’EPFL a entrepris, il y a une quinzaine d’années, de s’étendre au-delà de son campus lausannois pour créer des antennes un peu partout en Suisse romande, dans les cantons de Fribourg, Valais, Neuchâtel et Genève. Installée depuis 2013 à Sion, elle y a regroupé une dizaine de chaires spécialisées dans les nouvelles technologies énergétiques, la chimie verte, l’environnement, ainsi que la santé. Depuis leur installation à Sion, les chercheurs de l’EPFL Valais Wallis ont déjà levé plus de 85 millions de francs de tiers. 

HEI
Haute Ecole d’Ingénierie de la HES-SO Valais-Wallis

Le déménagement de la HEI sur le Campus Energypolis était une condition à la venue de l’EPFL en Valais, dans le but d’atteindre une masse critique de chercheurs suffisante à accélérer l’innovation. Inaugurée il y a 33 ans, la haute école connaît un succès grandissant depuis quelques années qui lui a permis d’atteindre la barre des 400 étudiants. Un succès qui peut être attribué à la perspective du rapprochement avec l’EPFL, mais aussi aux partenariats que l’école a signés avec de grands acteurs industriels que sont Constellium à Sierre et Lonza à Viège. C’est elle qui forme les ingénieurs de demain dans les domaines des Systèmes industriels, des Technologies du vivant ainsi que des Energies et techniques environnementales. 

Fondation 
THE ARK

La fondation pour l’innovation en Valais The Ark, financée par le Canton, organise et coordonne les différentes activités qui permettent l’établissement, l’éclosion, la croissance et l’épanouissement d’entreprises innovantes. Pour cela, elle leur met à disposition des locaux et les aide dans différentes démarches, notamment la recherche de fonds. Depuis 2004 déjà, CimArk (la branche opérationnelle de la fondation) incube des start-up sur six sites : les BioArk de Monthey et de Viège, l’IdeArk de Martigny, le PhytoArk de Sion-Conthey, le BlueArk Entremont et le TechnoArk de Sierre. Très proche de la HEI depuis plusieurs années, elle disposera aussi de ses propres bureaux sur le Campus Energypolis. Elle mettra à disposition des locaux pour les start-up et entreprises souhaitant collaborer avec l’écosystème du Campus.