Au cœur des mitochondries et de leur génome fascinant

© 2020 EPFL / Alain Herzog

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Des scientifiques de l’EPFL ont observé comment les mitochondries distribuent leur transcriptome dans la cellule — une première dans une cellule vivante. Le phénomène implique des granules d’ARN, qui présentent des propriétés particulièrement fluides.


Les mitochondries se trouvent dans toutes les cellules eucaryotes : les nôtres, celles des mammifères, des plantes et même des champignons. Elles fournissent l’énergie nécessaire pour que les cellules puissent fonctionner dans un organisme multicellulaire. Elles sont connues sous la dénomination de « centrales énergétiques » des cellules, et elles renferment l’information génétique qui permet de produire cette énergie.

Pour observer plus en détail les cellules vivantes, l’équipe de la biophysicienne Suliana Manley, à l’EPFL, collabore avec le groupe de biologie cellulaire de Jean Claude Martinou, à l’Université de Genève. Dans les mitochondries, on trouve des granules d’ARN plus petites que la limite de la diffraction de la lumière — plus petites, c’est à dire, qu’un millième de la largeur d’un cheveu. Avec la microscopie à super-résolution, les scientifiques ont découvert que l’ARN mitochondrial est emballé dans de minuscules gouttelettes, qui peuvent fusionner ou se fractionner. Ces résultats sont publiés aujourd’hui dans Nature Cell Biology.

« Grâce à cet aspect quasi liquide des granules d’ARN, l’organisation de l’information génétique est hautement dynamique dans les mitochondries, explique Suliana Manley. La manière dont elles échangent continuellement leur matériel permet de mieux comprendre comment elles font en sorte d’avoir l’information génétique requise pour produire de l’énergie dans la cellule. »

© 2020 EPFL / Alain Herzog

C’est la nature unique des mitochondries qui a poussé les scientifiques à examiner les granules d’ARN. En fait, le génome mitochondrial est indépendant de celui de la cellule. En d’autres termes, l’identité génétique des mitochondries est séparée de celle de la cellule et du reste de l’organisme. Le génome mitochondrial ne comporte qu’environ 16 000 paires de bases contre 3 milliards, soit 100 000 fois plus, pour l’ADN cellulaire. Il est transmis via la lignée maternelle, c’est-à-dire que la façon dont vos mitochondries produisent de l’énergie provient essentiellement de votre mère. On pense qu’elles ont pour origine les bactéries : il y a 1,5 milliard d’années, durant le cours de l’évolution, des bactéries ont peut-être été ingurgitées par d’autres cellules, où elles ont commencé une relation endosymbiotique. Avec le temps, ces microbes ont évolué pour devenir des organelles hautement spécialisées dans la production d’énergie.

Il est important de décrypter le travail des mitochondries pour mieux comprendre comment fonctionnent ou dysfonctionnent les cellules. Pour celles qui requièrent une grande quantité d’énergie, par exemple les cellules nerveuses ou musculaires, les anomalies des mitochondries peuvent avoir de sérieuses conséquences et entraîner de graves maladies.