Voir des cellules vivantes à l'échelle moléculaire

© EPFL / Alain Herzog

© EPFL / Alain Herzog

Des chercheurs de l’EPFL parviennent à produire des séquences filmées de l’évolution de cellules vivantes en combinant un microscope à force atomique et un système d’imagerie permettant de suivre individuellement des molécules rendues «clignotantes».

Des chercheurs ont combiné deux technologies de microscopie en un seul instrument. Réalisé au sein de l’Institut de bioingénierie de l’EPFL, le dispositif permet de capter des images de cellules vivantes à une résolution jamais atteinte, et même d’observer l’évolution de leur structure et de leurs caractéristiques moléculaires. Ce travail fait l’objet d’une publication dans la revue ACS Nano Letters.

Le secret réside dans une combinaison des images produites par deux technologies de pointe. L’appareil qu’ils ont assemblé se compose d’un microscope à force atomique à haute vitesse – dit «AFM», il balaie la surface à observer au moyen d’un minuscule palpeur. L’autre technologie est un microscope à localisation de molécule unique (single molecule localization microscope), qui a valu à ses inventeurs le Prix Nobel l’an dernier. Le premier est installé au-dessus de l’échantillon à observer, tandis que le second, monté «à l’envers», l’observe par en-dessous. Un logiciel spécialement développé par les chercheurs rassemble les images des deux appareils et fournit une visualisation précise et en relief de l’échantillon observé.

Deux regards, une image
«Le microscope AFM permet, avec une résolution nanométrique, d’observer la structure tridimensionnelle d’une cellule, explique Pascal Odermatt, doctorant au Laboratoire de bio- et nanoinstrumentation, dirigé par Georg Fantner. En revanche, il ne permet pas de caractériser les molécules qui sont présentes à l’intérieur.»

La seconde technologie mise en œuvre, dite PALM (photo activated light microscopy), repose sur l’utilisation de produits de contraste pour rendre «clignotantes» certaines molécules choisies et ainsi suivre leur parcours à l’intérieur d’une cellule.

Par la réunion du meilleur des deux mondes, les chercheurs peuvent faire correspondre les images à très haute résolution de protéines spécifiques au contexte structurel des cellules où elles se trouvent.

En prenant successivement des images de la même cellule vivante, les chercheurs ont pu suivre pour la première fois le comportement de certains groupes de protéines au sein de la structure tridimensionnelle des cellules. « Cela peut par exemple nous permettre d’observer les mécanismes internes de la division cellulaire, ou de découvrir comment les cellules souches réagissent aux forces mécaniques, précise Henrik Deschout, collaborateur scientifique au Laboratoire de biologie à l’échelle nanométrique, dirigé par Aleksandra Radenovic.

Encore au stade de prototype, l’installation réalisée à l’EPFL fait d’ores et déjà l’objet de l’intérêt de la part de la communauté scientifique, ainsi que d’un industriel mondialement reconnu dans le domaine de la microscopie. La technologie permet en effet d’éclairer d’un jour nouveau de nombreux mécanismes intriqués dans les cellules, lesquels sont d’une grande importance dans les domaines de la microbiologie, ainsi que de la biologie cellulaire et mécanique.


Auteur: Emmanuel Barraud

Source: EPFL