Une sommité de la réadaptation post-AVC débarque en Valais

© 2016 Sacha Bittel / Nouvelliste

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Sommité mondiale dans la réadaptation après un AVC, le professeur allemand Friedhelm Hummel a été nommé à la tête d’une chaire dédiée à Sion.

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La perle rare, l’intermédiaire idéal entre les ingénieurs et les cliniciens. Ainsi le président de l’Ecole polytechnique de Lausanne (EPFL) Patrick Aebischer qualifie-t-il le professeur Friedhelm Hummel. Cet Allemand de 46 ans sera dès le 1er septembre titulaire de la chaire en neuro-ingénierie clinique inaugurée hier à la Clinique romande de réadaptation de la SUVA à Sion (lire ci-dessous).

Le Hambourgeois est pionnier d’une méthode fondée sur la stimulation électrique et magnétique du cerveau. Une méthode non invasive qui doit permettre aux victimes d’un accident vasculaire cérébral (AVC) de récupérer au mieux leur autonomie. Friedhelm Hummel occupait jusqu’ici les postes de vice-directeur du service de neurologie et de responsable des laboratoires du sommeil et d’imagerie cérébrale et de neurostimulation du Centre hospitalier universitaire Hambourg-Eppendorf (D). Il partagera son temps de travail entre les pôles valaisan et genevois de l’EPFL. A Sion, il constituera une équipe d’une dizaine de chercheurs.

Qu’est-ce qui vous a convaincu de venir à Sion?

Ce projet, entre l’EPFL et la Suva, est stimulant. Le grand avantage d’être ici à la Clinique romande de réadaptation est que l’on peut appliquer directement les résultats de nos recherches et avoir des feedbacks cliniques rapidement. Avec ces deux questions: est-ce faisable? et est-ce efficient?

Les conditions ici sont très bonnes pour effectuer des recherches compétitives sur le plan international.

En quoi consiste la stimulation non invasive du cerveau?

En quelque sorte, on module les fonctions du cerveau, soit électriquement, soit magnétiquement. L’objectif est d’améliorer les fonctions de certaines parties du cerveau et d’en inhiber d’autres qui sont parfois trop actives. Cette technique est intéressante tant d’un point de vue thérapeutique que d’un point de vue scientifique pour comprendre ce qui se passe dans le cerveau.

Rappelez-nous ce qu’il se passe durant un AVC.

Il y a occlusion d’une artère. La région derrière cette artère ne reçoit plus de sang, et donc plus d’oxygène. Cette région meurt alors très vite, en l’espace de cinq minutes. Si elle a une certaine fonction, celle-ci est perturbée. Mais le cerveau a la capacité de se réorganiser, de faire en sorte que cette fonction soit totalement ou en partie reprise par une autre région du cerveau. Le principe de la neuro-réhabilitation est de forcer le cerveau à se réorganiser. Il peut le faire seul jusqu’à un certain point. Après entre en scène la technologie – exosquelettes, stimulateurs, interfaces notamment.

Douze millions de personnes sont victimes d’un AVC chaque année dans le monde (16000 en Suisse, 700 en Valais). C’est le plus grand défi de santé publique?

C’est l’un des plus grands, oui.

Pour quelles raisons?

Parce que c’est la principale cause de handicap à long terme. L’AVC a un impact socio-économique très fort. En plus des coûts de l’accident lui-même – soit, en Allemagne, environ 30 000 euros sur une vie –, il y a l’impact sur la vie professionnelle et sur la vie de famille notamment. L’objectif principal est d’aider davantage de gens à retrouver une vie normale après un AVC.

Ce qui est le cas, actuellement, pour quelle proportion de victimes?

Une sur deux. Et moins d’une sur quatre sans séquelles.

Et avec les technologies sur lesquelles vous travaillez?

C’est difficile de répondre. Actuellement, le problème est que l’on traite à peu près tous les AVC de la même manière. Or, tous les AVC ne sont pas les mêmes et ne se développent pas de la même manière. Nous devons chercher à déterminer tous les paramètres nous permettant de dire pourquoi une personne a besoin de la thérapie X et une autre a besoin de la thérapie Y.

Mais des tests de stimulation menés sur des personnes de plus de 60 ans en bonne santé nous ont montré que les possibilités d’amélioration étaient importantes.

A quel moment la stimulation intervient-elle?

Dans les jours et les semaines suivant l’AVC. C’est une thérapie qui dure toute une vie. Beaucoup de gens disent: «Après trois mois, tu ne dois rien faire.»

Scientifiquement, ce n’est pas vrai. Il est important que ce soit clair dans l’esprit des médecins et des gens: vous pouvez continuer à travailler, même si c’est dix ans après votre accident. Avec les bons outils, avec les bonnes interventions, avec le bon entraînement, vous pouvez toujours vous améliorer.

Quid des premières heures après l’accident?

Il y a pour l’heure peu de preuves que la stimulation du cerveau puisse réduire la taille de la lésion dans les premières heures après un AVC.