Un capteur photographique ultrasensible, dopé à la molybdénite

© Alain Herzog / EPFL

© Alain Herzog / EPFL

Des appareils photographiques cinq fois plus sensibles? Grâce à la molybdénite, un capteur d’image conçu à l’EPFL, qui repousse les limites de la technologie actuelle.

Un nouveau matériau pourrait multiplier par cinq la sensibilité des capteurs photographiques. Après avoir découvert en 2011 les étonnantes propriétés semi-conductrices de la molybdénite (MoS2), l’équipe d’Andras Kis à l’EPFL continue d’en explorer le potentiel. Candidat de plus en plus pressenti pour succéder au silicium, le MoS2 est cette fois-ci intégré dans un prototype de capteur d’image. Ce dernier affiche une sensibilité à la lumière cinq fois plus élevée que ses homologues du marché. La démonstration fait l’objet d’une publication dans Nature Nanotechnology.

Les appareils photo numériques fonctionnent tous selon le même principe. Il s’agit de convertir la lumière en charge électrique : lorsqu’il est suffisamment stimulé par les photons, un semi-conducteur à la surface du capteur laisse passer un courant électrique. L’efficacité du processus dépend de la quantité de lumière nécessaire pour déclencher ce transfert de charge. Le capteur est divisé en millions de cellules, chargées de générer le signal pour un seul pixel chacune.

Le pixel de tous les records
L’objectif des chercheurs de l’EPFL était de démontrer le potentiel de la molybdénite dans le domaine des capteurs d’image. En conséquence, leur capteur ne compte qu’un unique pixel. Mais comparé à ses homologues du commerce, basés sur le silicium, il lui faut cinq fois moins de lumière pour s’afficher! «Notre but est avant tout de prouver que le MoS2 est un candidat idéal dans ce type d’application», explique Andras Kis.

Une telle sensibilité ouvrirait le champ à la photographie de nuit, sans recourir à des procédés d’amplification générateurs de «bruit» - ces artefacts disgracieux – allonger le temps de pause ou s’aider d’un flash. Pour certains domaines pointus où les conditions de lumières ne sont pas souvent idéales, comme l’astrophotographie ou l’imagerie en biologie, l’avantage est encore plus évident. «Cela permettrait de prendre des photographie à la seule lueur des étoiles», estime Andras Kis.

Un matériau révolutionnaire
Ce sont avant tout les extraordinaires propriétés du MoS2 qui sont à l’origine de cette performance. Comme le silicium dans les capteurs du commerce, la molybdénite doit être alimentée par un courant électrique, en provenance de la batterie. Pour qu’un pixel soit généré, il faut que le courant généré par l’énergie lumineuse dépasse le seuil du courant d’alimentation.

Or la molybdénite, appliquée en couche monoatomique, permet une très faible alimentation électrique. En conséquence, il faut sensiblement moins d’énergie lumineuse pour que le seuil soit dépassé, et le pixel généré.

Le MoS2 est un matériau abondant et bon marché. En outre, précise Andras Kis, le prototype ne nécessite pas d’autres semi-conducteurs en conjonction – ce qui faciliterait grandement le processus d’industrialisation. Pionnier des recherches sur la semi-conductivité de la molybdénite, le chercheur a récemment démontré le potentiel de ce matériau en réalisant un circuit integré puis, début 2013, un prototype de mémoire flash. Ce premier pas dans le domaine de l’imagerie montre l’extraordinaire potentiel de ce matériau.


Auteur: Lionel Pousaz

Source: EPFL