Routes en hiver, sucrées-salées ou chauffées ?

A l’EPFL, plusieurs laboratoires étudient l’impact des conditions climatiques extrêmes sur les infrastructures routières. Au programme, performances des revêtements et nouvelles techniques de dégivrage des ponts.

L’augmentation du trafic routier n’est qu’une donnée du problème lorsqu’il s’agit de sécuriser les routes en hiver. « Les services d’entretien se retrouvent souvent coincés dans un embouteillage et totalement incapables de mener à bien leur mission. » explique le Professeur André-Gilles Dumont du Laboratoire des voies de circulation. C’est pour palier à ce genre de difficulté que certains tronçons de l’autoroute, sur le contournement de Lausanne par exemple, ont été munis de vannes : « Elles agissent comme l’arroseur automatique dans les pelouses et permettent de pratiquer un salage préventif et écologique puisque ce principe délivre 2 grammes de sel au m2 au lieu de 15. » Le laboratoire du Prof. Dumont a travaillé sur la méthodologie d’application de ce concept voilà plus de dix ans. Aujourd’hui le sel reste la panacée, des études menées à Berne ont démontré que le gravillonnage et le sablage n’étaient pas la solution. Leur production, leur récupération dans les canalisations et leur décontamination engendre un bilan écologique très mauvais, quant au sucre moins abrasif, son prix reste pour l’heure, trop élevé.

Il faut pourtant trouver des solutions : -10 le mardi, +8 le jeudi. Ces changements soudains de température autour du zéro intéressent tout particulièrement le LAVOC : « Quand le climat se rapproche d’un modèle exotique avec de brusques changements météorologiques et de rapides écarts de température, il met à mal les revêtements des routes, peut provoquer des orniérages, le gel et dégel des matériaux altérant les caractéristiques de surface. » Un projet de thèse a ainsi été lancé, financé par l’Office fédéral des routes, afin de comprendre, grâce à un modèle de simulation de températures en surface et en profondeur, l’effet des cycles. « On peut avoir des vitesses de variation de températures de surface de l’ordre de 5 degrés par heure » explique le prof Dumont.

Et si le problème du verglas était résolu par une chaussée chauffante ? Le Professeur Lyesse Laloui en charge du Laboratoire des mécaniques des sols explore cette piste. Le laboratoire travaille depuis une dizaine d’années sur une nouvelle énergie renouvelable, les géo structures énergétiques. Il s’agit d’utiliser les fondations d’un ouvrage en béton pour collecter et stocker la chaleur : « Après avoir travaillé sur les échanges énergétiques dans les bâtiments, nous avons commencés récemment à nous intéresser au problème de verglas sur les ponts. L’idée est de capter la chaleur sur le tablier du pont en été puis d’utiliser les culées pour la récupérer et la stocker dans la terre. » En posant un circuit de tubes sous le revêtement bitumineux, comme un chauffage au sol, de l’eau additionnée à un fluide calo porteur circule et garde une température qui évite la fine couche de verglas. Mais la réflexion du Prof Lyesse Laloui sur le sujet va encore plus loin : Se servir de la chaleur des tunnels où il règne en permanence une température d’environ 25 degrés ! « C’est une énergie qui est là, disponible. Notre idée est d’utiliser les barres d’ancrage du tunnel comme échangeur de chaleur. Il s’agit, pour nous, d’un véritable transfert de connaissances. Les outils développés pour les bâtiments nous servent maintenant à faire des simulations numériques de faisabilité. »
Chaussées autonettoyantes, ponts chauffants, tunnels producteurs d’énergie, c’est donc aussi sur nos routes qu’on trouvera des parades aux futurs défis climatiques. La neige peut continuer de tomber…


Auteur: Sandy Evangelista

Source: EPFL