Le riz, nouvel allié des traitements contre le choléra

Vibrio cholerae © 2014 ThinkStock Photos

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Des chercheurs de l’EPFL ont prouvé que la thérapie de réhydratation contre le choléra, bien qu’efficace, pourrait amplifier la toxicité de la bactérie responsable de la maladie. Forts de nouvelles données, ils proposent de la modifier en troquant le glucose contre de l’amidon de riz.

Le choléra est provoqué par une bactérie, la Vibrio cholerae, qui infecte l’intestin grêle et induit des diarrhées sévères ainsi que des vomissements susceptibles d’entraîner une déshydratation, voire la mort. La thérapie usuelle consiste en une réhydratation orale, où le patient boit de l’eau mélangée à des sels et du glucose, qui aide l’intestin à assimiler ces derniers. Bien que ce traitement soit efficace, il existait jusqu’ici une suspicion que le glucose aggrave la maladie. Des scientifiques de l’EPFL ont désormais démontré que c’était en effet le cas, le glucose augmentant la toxicité de la bactérie du choléra. Ils montrent aussi que remplacer ce dernier par de l’amidon pouvait réduire sa toxicité de 75%. Leur étude est publiée dans PLOS Neglected Tropical Diseases.

Sans traitement, la moitié des malades meurent. La réhydratation orale permet de faire chuter ce taux de mortalité à 1%. Cependant, le glucose utilisé pose problème. La bactérie impliquée en consomme également, ce qui lui permet d’amplifier l’expression de ses gènes et d’augmenter sa production de « toxine cholérique ».

Des alternatives au glucose

Melanie Blokesch et Andrea Rinaldo de l’EPFL ont collecté des données corrélées issues d’une épidémie récente de choléra en Haïti, qui décrivent l’efficacité de la thérapie de réhydratation orale. Le laboratoire de Melanie Blokesch a ensuite cultivé la bactérie avec divers sucres (glucose, sucrose) ainsi que de l’amidon de pommes de terre et de riz afin de tester comment les gènes toxiques sont affectés.

Les scientifiques ont découvert que tant l’activité des gènes que la production de toxine cholérique étaient plus importantes quand la bactérie était nourrie au glucose, mais que celles-ci diminuaient en ayant recours à l’amidon de riz. Même si l’explication de ce phénomène est compliquée, l’une de ses causes réside dans le type de sucres proposés à la bactérie, qui affecte les mécanismes régulateurs de l’activité des gènes producteurs de toxines. Au final, cela influence la capacité de la bactérie à infecter les êtres humains.

L’équipe d’Andrea Rinaldo s’est surtout intéressée à croiser ces données avec les données recueillies en Haïti. Grâce aux chiffres de l’épidémie apparue en 2010, ils ont développé un modèle mathématique de l’épidémiologie de la maladie. Ils l’ont ensuite modifié en incluant une thérapie de réhydratation orale basée sur l’amidon de riz plutôt que sur le glucose. Les résultats ont prouvé que cette alternative aurait permis de réduire de 30% les cas de choléra sur l’île (375’000 au lieu de 520’000) pendant les 14 premiers mois de l’épidémie.

Ces conclusions arrivent à point nommé dans le débat en cours concernant les traitements contre le choléra, et incitent à revoir les approches usuelles. « Nous ne disons pas aux gens d’arrêter la thérapie de réhydratation orale, car elle fonctionne bien, » explique Melanie Blokesch. « Cependant, les données récoltées suggèrent qu’elle pourrait être améliorée et que la communauté doit en tenir compte – surtout dans des régions très touchées par la maladie. »

Cette étude a été réalisée par le Laboratoire de microbiologie moléculaire (Melanie Blokesch) et le Laboratoire d’échohydrologie (Andrea Rinaldo) de l’EPFL, en collaboration avec l’École polytechnique de Milan et l’Université de Padoue.

Source

Kühn J, Finger F, Bertuzzo E, Borgeaud S, Gatto M, Rinaldo A, Blokesch M. Glucose- but not rice-based oral rehydration therapy enhances the production of virulence determinants in the human pathogen Vibrio cholerae.PLOS Neglected Tropical Diseases DOI: 10.1371/journal.pntd.0003347



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Un "petit-lit de choléra" en Haïti © 2014 Melanie Blokesch
Un "petit-lit de choléra" en Haïti © 2014 Melanie Blokesch
Vibrio cholerae © 2014 ThinkStock Photos
Vibrio cholerae © 2014 ThinkStock Photos
© 2014 ThinkStock Photos
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