Le cerveau, un réseau sous surveillance
Comment notre cerveau gagne-t-il en efficacité au cours de notre vie? Une nouvelle technologie permet de visualiser les fibres cérébrales et de mieux comprendre le phénomène.
Le cerveau humain est en constante évolution. Tout au long de la vie, le réseau de fibres qui connecte entre elles les différentes zones cérébrales ne cesse de gagner en efficacité. Pour la première fois, on a pu vérifier le phénomène sans recourt à des mesures invasives. Le fait de ne pas devoir prélever de tissus élargi considérablement le spectre des recherches scientifiques envisageables, et pourrait s’avérer une aide précieuse pour les neurochirurgiens.
Les chercheurs de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) et l’Université de Lausanne (UNIL), en collaboration avec la Harvard Medical School, ont mis au point un programme informatique qui permet de réaliser une véritable cartographie de la connectivité cérébrale d’un individu. Mentionné la semaine dernière dans l’édition en ligne de PNAS, leur travail est notamment susceptible de faire progresser les recherches sur l’épilepsie et la schizophrénie.
Brain's internal network decoded @ EPFL (vidéo en anglais)
«Notre logiciel rassemble une série de processus. Cela commence par un IRM individuel et se termine par une carte personnalisée du réseau de fibres qui se trouve dans le cerveau, explique Jean-Philippe Thiran, professeur à l’EPFL et directeur du Laboratoire de traitement des signaux 5. Il a fallu toute une équipe d’ingénieurs, de mathématiciens, de physiciens et de médecins pour y parvenir.»
Le cerveau évolue comme internet
Selon les chercheurs, le cerveau d’un enfant ressemble à l’Internet à ses débuts, avec des centres isolés et mal reliés par des connexions peu efficaces. Le cerveau adulte, quant à lui, pourrait être comparé à un réseau moderne de fibres optiques, entièrement intégré. L’équipe a pris pour hypothèse que la matière blanche du cerveau – les faisceaux de neurones qui connectent les différentes parties du cerveau – connaît une maturation qui transforme des connexions fragiles et en de puissantes autoroutes neuronales.
Pour tester cette idée, les chercheurs ont collaboré avec des collègues de la Harvard Medical School et de l’Université de l’Indiana. Ils ont cartographié le cerveau d’une trentaine d’enfants et de jeunes gens âgés de 2 à 18 ans. Grâce à l’IRM, ils ont pu observer la façon dont l’eau se diffuse dans le cerveau et visualiser les fibres qui la véhiculent. Jean-Philippe Thiran et Patrick Hagmann, professeur au département de radiologie de l’UNIL-CHUV, ont ensuite créé une base de données des diverses sections transversales des fibres et en ont représenté les résultats sur des graphiques. Ils ont pu ainsi élaborer un modèle tridimensionnel de chaque cerveau, montrant les milliers de brins qui en connectent les différentes parties.
Droitiers et gauchers : chacun son cerveau
Ces modèles individuels donnent une idée non seulement de la manière dont se développe le cerveau d’un enfant, mais aussi des différences structurelles qui existent entre le cerveau d’un gaucher et d’un droitier, par exemple, ou entre celui d’un témoin et d’une personne souffrant d’épilepsie ou de schizophrénie.
La méthode pourra également aider les neurochirurgiens à savoir plus précisément où inciser pour soulager les symptômes de l’épilepsie et, également, dans quels endroits il vaut mieux éviter de jouer du scalpel. Jean-Philippe Thiran et Patrick Hagmann envisagent de mettre gratuitement leur outil à disposition des hôpitaux du monde entier dès le début de l’année prochaine.
Contacts:
Jean-Philippe Thiran, +41 21 694 4623, [email protected]
Patric Hagmann, +41 76 512 93 55 / +41 79 556 02 12, [email protected]