L’EPFL contribuera-t-elle à former les Michael Phelps ou Laure Manaudou de demain? Les chercheurs du LMAM, en collaboration avec l’Université de Lausanne (UNIL), ont en tous cas franchi une première étape vers l’amélioration des entraînements des nageurs de haut niveau. Sur demande du club Lausanne Natation, ils ont développé des systèmes inertiels waterproof munis d’accéléromètres et de gyroscopes qui, insérés dans une combinaison de natataion spéciale, mémorisent divers signaux lors de la nage. Grâce aux algorithmes développés par les chercheurs, ces informations, traitées par voie informatique, permettent d’extraire en quelques minutes des données essentielles telles que la performance, la coordination et les dépenses en énergie du nageur. « Ce système, appelé Physilog III, comporte de nombreux avantage par rapport aux caméras conventionnelles utilisées jusqu’ici par les coaches, explique Farzin Dadashi, doctorant en charge du projet. Une caméra ne peut se focaliser que sur un seul nageur à la fois et l’analyse des données prend plusieurs jours. Porté par les nageurs, notre système, en revanche permet d’étudier simultanément et automatiquement les paramètres de différents sportifs, et cela en quelques minutes seulement. »
Des tests assidus en crawl et brasse
Pour mener à bien ses recherches, sponsorisées par le Fonds National Suisse (FNS), Farzin Dadashi a effectué toute une batterie de tests sur les nageurs du Lausanne Natation, qui comptent parmi les meilleurs de Suisse. Deux sortes de nages ont été passées au crible: le crawl et la brasse. « Nous avons développé une combinaison de natation spéciale munie de poches, permettant d’insérer les capteurs à des endroits stratégiques (quatre sur les bras, un sur le dos et deux sur les jambes). » Un dispositif qui a permis le calcul de divers paramètres, tels que la coordination et la vitesse instantanée du nageur. « Pour mesurer l’index de coordination, nous avons détecté à partir des phases temporelles de chaque cycle, le laps de temps écoulé entre la propulsion donnée par chacun des bras. Les chercheurs de l’UNIL se sont quant à eux focalisé sur l’analyse physiologique des données en utilisant un système d’analyse d’échange gazeux, aidé d'une sorte de tuba. Grâce à leur étude, nous pouvons à présent associer la dépense énergétique avec la coordination et la vitesse obtenues à travers nos calculs.»
Une technologie exigeante
La réalisation des capteurs, la fusion de leurs signaux ainsi que le développement de cette technologie n’a pas été chose facile, car l’analyse de la natation comporte des écueils spécifiques. « Le fait de rendre les capteurs résistants à l’eau et étanches a pris du temps», note Farzin Dadashi. Directeur du laboratoire de mesure et d’analyse des mouvements (LMAM), le professeur Kamiar Aminian ajoute : « ce projet représente un vrai défi. Les mouvements dans l’eau sont très différents des mouvements sur terre. Il faut par exemple tenir compte du flottement et de la trainée, explique-t-il. La locomotion aquatique implique également un glissement continu du corps, ce qui complique le calcul de la vitesse. » Autant d’obstacles qui font de la natation le parent pauvre de la modélisation biomécanique des sports. La nouvelle technologie développée par l’EPFL devrait toutefois changer la donne. Grâce aux systèmes inertiels de l’EPFL et aux algorithmes conçus, les entraîneurs pourront donner un feed-back précis aux sportifs, pour une meilleure « organisation » de la nage, des pertes d’énergie moindres grâce à une meilleure coordination et une amélioration de la performance globale.
Football et course à pied
A noter que le LMAM n’en est pas à son coup d’essai en ce qui concerne la modélisation biomécanique des mouvements des sportifs : des analyses similaires ont déjà été menées pour le golf, le tennis et la boxe. Et le laboratoire n’entend pas s’arrêter là. Les projets en cours et futurs concernent aussi bien le saut à ski, le ski de randonnée et le ski de fonds que le football et la course à pied.