La bande d'arrêt d'urgence active fait ses preuves

© Alain Herzog 2014

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Après 4 ans d’application, l’ouverture partielle de la bande d’arrêt d’urgence à Morges a des effets conséquents sur la fluidité du trafic, constatent des chercheurs de l’EPFL. Ceux-ci proposent néanmoins des pistes d’améliorations.

On appelle cela une «BAU active». Lisez: une bande d’arrêt d’urgence ouverte temporairement à la circulation. Depuis janvier 2010, c’est le cas sur un tronçon de 4 kilomètres entre Morges et Ecublens. Le but est d’écouler de façon plus fluide, aux heures de pointe, les 82’000 véhicules quotidiens qui circulent sur l’autoroute A1 Lausanne-Genève.

Avec quel succès? Des chercheurs du Laboratoire des voies de circulation (LAVOC) de l’EPFL ont évalué l’efficacité et les impacts de cette mesure. Ils constatent qu’elle diminue sans conteste la congestion et les accidents; toutefois, quelques adaptations permettraient un résultat optimal.

L’effet le plus remarquable de la BAU active est l’augmentation du débit: environ 750 véhicules par heure en plus sur un total d’environ 6000 véhicules, malgré une vitesse abaissée de 120 km/h à 100 km/h. En dépit de cette augmentation de trafic, «les simulations montrent que cela représente une diminution d’un cinquième des émissions de CO2 grâce à un trafic plus fluide et une vitesse réduite», souligne le professeur André-Gilles Dumont, responsable du LAVOC.

Mais l’efficacité de la mesure tient souvent à une question de minutes. Lorsque la densité du trafic atteint 35 véhicules/km, une alarme se met en marche au poste de contrôle de la Blécherette. Un préposé doit alors activer manuellement l’ouverture de la troisième voie. Parfois, il suffit de quelques minutes de délai pour qu’un bouchon se forme et prenne du temps à se résorber. «Nous cherchons à intégrer d’autres paramètres pour décider de l’ouverture du système: la répartition par voie ou les différences de vitesses entre les voies notamment. Le plus important est de maintenir la fluidité du trafic car il est très difficile de la rétablir lorsque la congestion s’est formée», précise le professeur.

Une meilleure signalisation

En matière d’accidents aussi, un système plus réactif permettrait d’améliorer encore la situation. L’instauration de la bande d’arrêt d’urgence active a déjà permis une diminution d’un quart du nombre d’accidents entre 2008 et 2013. «Ils sont souvent liés aux changements de voies. Si l’on veut les réduire, il est essentiel d’informer le plus tôt possible les automobilistes entrant sur l’autoroute, par exemple afin qu’ils restent autant que possible sur la BAU active», explique André-Gilles Dumont.

Les sondages réalisés par les chercheurs deux ans après le début de l’opération du système ont montré enfin que la mesure n’était pas encore parfaitement adoptée. Près de 70% des sondés ne rechignaient pas à utiliser la BAU quand elle est ouverte. Cependant un quart s’est déclaré mal à l’aise de franchir la ligne blanche continue et la même proportion ne se sent pas en sécurité.

Pour y remédier, les scientifiques préconisent une meilleure signalisation. «Un kilomètre en amont de l’entrée dans le système, à Aubonne et Crissier en l’occurrence, il faudrait placer un panneau indiquant si la troisième voie est ouverte ou fermée», précise le professeur. En outre, sur le tronçon concerné, l’étude recommande d’indiquer la vitesse limite sur chaque voie. Actuellement, seuls deux panneaux indicateurs de vitesse sont installés sur les portiques, placés ainsi entre les voies. Une réflexion est engagée en parallèle sur une signalisation spécifique qui permettrait de franchir avec moins d’appréhension la ligne blanche continue.

Autres tronçons à l’étude

Menée depuis 2011, la présente étude offre de nouvelles perspectives d’avenir. En collaboration avec deux autres laboratoires de l’EPFL, les chercheurs ont engagé, à l’aide de drones, une analyse du comportement des usagers. Quand changent-ils de voies? A quelles conditions? Quelles trajectoires empruntent-ils? Des vols pour effectuer les relevés ont eu lieu en mars 2014. L’analyse de cette étude exploratoire est en cours.

Le bilan de l’ouverture partielle de la bande d’arrêt d’urgence à Morges est d’autant plus pertinent que d’autres tronçons autoroutiers suisses pourraient disposer d’un système similaire. Ce sera le cas dès 2015 dans la région de Berne entre les échangeurs de Berne-Wankdorf et de Muri. Dans les tiroirs reposent également des aménagements pour l’entrée de Genève, entre Nyon et l’échangeur du Vengeron, ou entre la jonction de Cossonay et l’échangeur de Villars-Sainte-Croix.

Le Laboratoire des voies de circulation (LAVOC) a été mandaté par le Fonds pour la recherche routière pour réaliser cette étude. Il a collaboré avec le Laboratoire de topométrie (TOPO) et le Laboratoire de vision par ordinateur (CVLAB).



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© Alain Herzog 2014
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