«L'innovation en Suisse a besoin de davantage d'investissements»

Dominique Foray. © Alain Herzog / EPFL

Dominique Foray. © Alain Herzog / EPFL

Professeur au Collège du Management de l’EPFL, Dominique Foray est l’un des auteurs du premier Rapport fédéral sur la recherche et l’innovation en Suisse, présenté aujourd’hui à Berne. Il souligne et explique la pole position du pays dans les classements internationaux, mais relève quelques écueils à éviter et des pistes d’amélioration. Interview.

C’est la première fois que le Rapport recherche et innovation en Suisse est publié, sous l’égide du Département de l’économie, de la formation et de la recherche. Quelle est l’utilité de ce travail ?

Dominique Foray : Il fait suite à une intervention parlementaire. La bonne position de la Suisse dans le domaine de l’innovation est connue et reconnue grâce à plusieurs classements internationaux, mais la base scientifique sur laquelle se fonde cette appréciation manquait. Les chiffres seront remis à jours tous les deux ans, et le rapport complet réactualisé tous les quatre ans afin de pouvoir observer des évolutions.

Vous mettez en lumière plusieurs atouts, tels que la qualité du système de formation et recherche et l’ouverture internationale du pays. Ces conditions ne sont-elles pas en train de se détériorer ?

Il y a bien sûr des tensions et des incertitudes, liées aux coupes budgétaires et aux suites de l’initiative contre l’immigration de masse. Le danger que représente cette dernière ne concerne pas seulement l’accès aux fonds de recherches européens, mais menace également le marché du travail et la création de nouvelles entreprises, qui sont souvent le fait d’étrangers. Nous soulignons toutefois aussi qu’il y a des capacités internes au pays qui ne sont pas encore suffisamment exploitées pour faire fructifier la recherche et l’innovation, à commencer par l’engagement de davantage de femmes dans le domaine scientifique.

On voit beaucoup de start-ups partir très vite à l’étranger. Ne pourraient-elles pas être davantage soutenues ici ?

Il est vrai que la comparaison avec des pays tels que la Suède ou Israël nous laisse songeurs. Dans ce dernier cas, l’Etat est particulièrement actif dans les investissements, ce qui ne serait pas bien perçu en Suisse. En revanche, l’idée d’un «Fonds pour l’avenir», qui serait alimenté par les caisses de pension à hauteur de 1% de leur chiffre d’affaires, fait déjà son chemin. Ce serait une excellente chose pour stimuler le développement des jeunes pousses, particulièrement dans les domaines liés à l’informatique, qui peinent à convaincre les investisseurs malgré des potentiels énormes.