L'informatique doit réduire sa consommation d'énergie

Les centres de calcul (ici une salle de serveurs à l'EPFL) consomment des quantités croissantes d'énergie. © Alain Herzog

Les centres de calcul (ici une salle de serveurs à l'EPFL) consomment des quantités croissantes d'énergie. © Alain Herzog

Lancé aujourd’hui, le consortium ecocloud rassemble plusieurs laboratoires de l’EPFL pour s’attaquer à l’explosion des besoins en électricité des grands centres de calcul.

Les géants de l’informatique ont la tête dans le nuage. De plus en plus souvent, les grosses opérations de calcul ou de stockage ont lieu dans d’énormes «data centers» construits par les géants du net – Yahoo ! est par exemple en train d’en installer un colossal à Avenches (VD). Comme les besoins n’ont cessé de croître, au point que l’informatique est devenue absolument indispensable à notre société, et que les données et les programmes doivent désormais être accessibles de partout sans que l’utilisateur ait à savoir où ils sont stockés, l’industrie a imaginé l’expression poétique de «cloud computing» pour désigner leur organisation.

Mais l’orage menace. La quantité de données que les fournisseurs de ces services doivent absorber et traiter suit une croissance exponentielle. L’énergie qu’ils consomment augmente de même – on estime aujourd’hui que l’empreinte carbone des centres de données équivaut à celle de l’aviation dans le monde entier !
A l’EPFL, douze laboratoires se rassemblent au sein du consortium ecocloud, lancé aujourd’hui au cours d’une manifestation qui se déroule au Rolex Learning Center. Son objectif est de travailler à la réduction de la consommation énergétique de ces centres de calculs.

Deux limites ont été atteintes
L’urgence de travailler à la réduction de leur consommation n’est pas seulement écologique: aux Etats-Unis, l’an dernier, leurs besoins atteignaient 1,5% du total de l’énergie consommée dans le pays. Une part énorme, qui s’est chiffrée à 4,5 milliards de dollars. Les économies en jeu si l’on parvient à juguler cette débauche d’énergie représentent des sommes colossales. «Nous constatons aujourd’hui que le progrès technologique en matière de matériel informatique se heurte à deux limites, explique Babak Falsafi, professeur au Laboratoire d’architecture de systèmes parallèles (PARSA) de l’EPFL. Nous ne pouvons plus réduire le voltage utilisé dans les puces électroniques, ce qui permettait jusqu’ici d’éviter que leur consommation augmente au même rythme que la puissance de calcul des processeurs. En outre, la quantité de données augmente beaucoup plus vite que la technologie pour les gérer.»

L’ambition du centre ecocloud s’exprime sur un graphique: l’évolution de la consommation des centres de données ne doit plus suivre une courbe exponentielle, mais une croissance linéaire. Sans cela, la viabilité économique du secteur IT ne pourra plus être assurée. «Je ne m’attends pas à une véritable révolution dans les dix prochaines années, souligne le professeur. Mais nous poursuivons plusieurs pistes qui nous laissent espérer une augmentation progressive de l’efficience des processeurs et des mémoires, d’un facteur 100 d’ici 10 ans.»

Fort soutien des industriels
Les travaux d’ecocloud s’organisent en trois thèmes: les données, l’énergie et l’intelligence. Parmi les recherches prometteuses figurent par exemple celles qui visent à gérer le refroidissement des processeurs directement en fonction des tâches qu’ils ont à accomplir à un moment donné. Ou la construction «verticale» d’un système intégrant la mémoire au-dessus d’un processeur, afin d’augmenter et d’optimiser la circulation de l’information entre eux.

Preuve de l’intérêt économique de ces recherches, ecocloud compte de nombreux partenaires industriels: Credit Suisse, HP, IBM, Microsoft, Nokia, Oracle, Swisscom et Intel. En outre, le programme bénéficie de fonds de recherche suisses (via le programme nano-tera) et européens. «Grâce à ce soutien et les compétences de nos chercheurs, nous pensons pouvoir devenir un centre de compétences reconnu au niveau européen dans le domaine du cloud computing», résume Babak Falsafi.