L'EPFL à l'assaut du Globe dans le sillage de Bernard Stamm

Rivages, le nouveau monocoque de Bernard Stamm, juste avant de sortir du chantier naval de Bertrand Cardis, Décision. © Alain Herzog

Rivages, le nouveau monocoque de Bernard Stamm, juste avant de sortir du chantier naval de Bertrand Cardis, Décision. © Alain Herzog

Le navigateur vaudois collabore avec l’EPFL pour l’équipement de son nouveau bateau, Rivages, conçu pour le Vendée Globe 2012. Sorti du chantier naval Décision d’Ecublens la semaine passée, le monocoque de près de 20 mètres sera baptisé à La Ciotat (F) ce week-end.

Seule une modeste colline, le Motty d’Ecublens, sépare l’EPFL du chantier naval Décision, de Bertrand Cardis. A cette proximité géographique s’ajoutent de nombreuses affinités techniques, scientifiques et même affectives. Rivages, le nouveau géant des mers du navigateur vaudois Bernard Stamm, ajoutera un chapitre de plus à l’histoire nautique des laboratoires de l’EPFL.

Grâce à l’appui de la Fondation de famille Sandoz, propriétaire du bateau et qui entretient des liens privilégiés avec la Haute école lausannoise, cette dernière a pu apporter son savoir-faire dans plusieurs domaines et profiter d’interactions fructueuses avec l’équipe technique du navigateur. Des travaux sur l’optimisation des matériaux qui composent le bateau ont par exemple été réalisés au Laboratoire de technologie des composites et polymères (LTC) pour répondre au mieux aux exigences des constructeurs.

La voile en temps réel
Au-delà de ce rôle de «conseiller scientifique» lors la construction proprement dite, plusieurs équipes de l’EPFL continuent à suivre en temps réel l’aventure de Bernard Stamm. Le Laboratoire de vision par ordinateur (CVLAB), en collaboration avec la société Space3D, a ainsi d’ores et déjà placé de nombreuses caméras sur le bateau. Il en ajoutera d’autres, dont la mission sera d’observer les voiles et de modéliser leurs mouvements, en trois dimensions et en temps réel, afin de pouvoir mieux comprendre l’écoulement des vents et optimiser leurs réglages.

D’autres expériences, notamment océanographiques, seront menées à bord. Leur intérêt dépasse donc de loin le seul monde de la voile. Le Laboratoire de communications audiovisuelles (LCAV), qui avait déjà mis au point les capteurs environnementaux du projet SensorScope, est ainsi en train de développer un «minilab», aussi léger que possible. Toutes les heures, celui-ci effectuera un prélèvement d’eau, pour en analyser automatiquement plusieurs paramètres (température, salinité, oxygénation, turbidité, teneur en micro-organismes) qu’il transmettra à terre. Océanopolis et le CNRS pourront les exploiter immédiatement dans le cadre d’une étude spécifique sur le microplancton, et ils seront également mis à la disposition de la communauté scientifique. «La course emprunte des routes très peu fréquentées autour de l’Antarctique, c’est une excellente opportunité pour recueillir des données rares et précises et les confronter aux mesures prises par satellite», explique Guillermo Barrenetxea, collaborateur scientifique au LCAV.

Besoin d’énergie(s)
Un bateau high-tech tel que Rivages ne se contente pas d’un peu de vent et d’eau fraîche. Les nombreux équipements électroniques nécessaires à la navigation et – en l’occurrence – à toutes ces tâches scientifiques ont besoin d’électricité. Comment la produire localement et la gérer au mieux sans pour autant alourdir et freiner l’embarcation ? Trouver la meilleure solution constitue le mandat du Laboratoire d’électronique industrielle (LEI). «Il faut non seulement optimiser les instruments pour les amener vers davantage d’économies d’énergie, mais aussi développer un système intelligent pour gérer l’utilisation, les réserves et la recharge des batteries», résume Philippe Barrade, premier assistant au LEI.

Capteurs solaires, éoliennes, hydroliennes et génératrice diesel sont les principaux candidats à la fourniture d’électricité. Une combinaison de ces sources devra couvrir les besoins du bateau sans trop solliciter l’attention du skipper. «Il faudra donc que notre système de production et de gestion soit d’une grande fiabilité», ajoute Philippe Barrade.

Le 11 novembre 2012, aux Sables-d’Olonne, le bateau-starter donnera le signal du départ du Vendée Globe, mythique course en solitaire, sans escale et sans assistance. Imposant monocoque de 60 pieds galbé comme un goéland, Rivages s’élancera alors à l’assaut des mers du sud avec Bernard Stamm à la barre.

Dix-huit mois de préparation

Pour l’heure, il vient de subir un voyage par convoi exceptionnel pour rallier La Ciotat, non loin de Marseille, où il est arrivé hier. Et recevra ce week-end la traditionnelle rasade de champagne qui le baptisera, ainsi que son mât, ses voiles, tous les appendices qui lui manquent encore. Il tirera ses premiers bords au début du mois de mai, paré des couleurs de son sponsor «Cheminées-Poujoulat», et réalisera plusieurs courses d’entraînement cette année (Tour de l’Europe, Transat Jacques Vabre).

Dix-huit mois de préparation qui seront utiles autant au navigateur et à son équipe qu’aux scientifiques embarqués dans le projet. «Ce partenariat va nous permettre d’avancer dans plein de domaines, se réjouit Bernard Stamm. En plus de recueillir des données importantes, nous pourrons améliorer la fiabilité et la performance du bateau.» Du côté de l’EPFL, on souligne aussi de l’impact de ce grand projet: «Résoudre des questions concrètes sur une réalisation aussi spectaculaire est extrêmement motivant pour les chercheurs et les étudiants», assure Pascal Vuilliomenet, adjoint à la vice-présidente pour l’innovation et la valorisation.