En cas d'échec à l'EPFL, les étudiants se réorientent avec succès

© 2016 EPFL / Alain Herzog

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Que deviennent celles et ceux qui abandonnent leurs études durant leur bachelor? Comment rebondir quand on s’est trompé de voie? Le Centre de carrière de l’EPFL s’est penché sur le parcours des étudiants qui quittent l’école pour une autre orientation

En plongeant dans le grand bain de l’EPFL, les étudiants se trouvent confrontés à un niveau d’exigence élevé et à une méthode d’apprentissage très différente du gymnase ou du lycée. Résultat, nombre de nouveaux étudiants n’obtiennent pas les notes suffisantes en fin de première année. Si la moitié de ceux qui redouble réussissent ensuite, les autres sont confrontés à un échec définitif, qui signe la fin de leurs études à l’EPFL et une réorientation.

Difficile à vivre, cette transition permet toutefois de réaliser des études à succès dans une autre université ou haute école. C’est ce que montre une étude réalisée par le Centre de carrière de l’EPFL, qui a pour mission d’aider les étudiants dans leur insertion professionnelle.

Universités et HES en tête
«Dans la majorité des cas, les étudiants se réorientent vers des études d’ingénierie ou d’économie», explique Philippe Ory, responsable du Centre de carrière. Parmi les 883 personnes ayant répondu à l’enquête, 85% ont commencé une nouvelle formation dans les 12 mois qui ont suivi leur départ de l’EPFL, et 7% de plus l’ont fait par la suite. Les Hautes Écoles Universitaires Suisses sont le premier choix des étudiants (43%), suivies par les Hautes Ecoles Spécialisées à 33%. Le reste des étudiants interrogés a choisi la Haute École Pédagogique, une formation professionnelle ou encore des études à l’étranger.

Avec, à la clé, des taux de réussite quasi identiques à la moyenne de ces filières. «Cela prouve que ces étudiants ne sont pas perdus pour les études, bien au contraire», se réjouit Philippe Ory. Comment expliquer alors les échecs de ces mêmes personnes à l’EPFL ? «Certains étudiants rencontrent des difficultés familiales, ils ont de la peine à se loger ou à gérer un travail à côté de leurs études, explique Philippe Ory. Dans les cas où leur niveau académique n’est pas suffisant, il y a souvent un problème de rythme ou de méthode de travail.» Quelles que soient les raisons, il est important de faire le point sur sa situation lorsque les notes ne suivent pas: est-il encore possible de changer de section ? Faut-il terminer son année? S’il existe une chance de rattraper son retard, le Centre de carrière recommande de ne pas abandonner. Si ce n’est pas le cas, cette période peut être mise à profit pour un stage de travail, un séjour linguistique, l’école de recrue, ou un travail personnel pour améliorer ses capacités d’apprentissage.

Une situation qui pourrait évoluer dès la rentrée de septembre, avec l’introduction d’un nouveau système pour permettre aux étudiants en difficulté de combler plus vite leurs lacunes. Appelé cours de Mise à niveau, il concernera les personnes en situation d’échec au semestre d’hiver. Ce cours aura pour objectif de consolider les bases scientifiques pour répéter l’année propédeutique avec succès, et, en cas de résultat insuffisant, de permettre à l’étudiant de se réorienter après une année seulement. Histoire de pouvoir se lancer dans une nouvelle formation sans perdre de temps.

Témoignage: Rachel Bungener
(Début d’études en Chimie à l’EPFL, puis études en Géosciences à l’UNIL)

«J’ai étudié durant quatre ans à l’EPFL à partir de 2008, avant de faire un double échec en 2e année de chimie. Le problème venait sans doute d’une mauvaise orientation, car ayant suivi le CMS puis réussi la première année, je n’ai pas réfléchi à un changement de section lorsque j’ai raté ma deuxième année. Ensuite, après un second échec, c’était trop tard. Avec le recul, je me rends compte que j’avais besoin d’un lien plus concret entre ce que j’étudie et les problématiques réelles. L’approche de la chimie à l’EPFL ne me convenait pas, même si j’avais des notes correctes dans d’autres branches. Après ce double échec, j’étais un peu perdue et mes parents m’ont dit de prendre le temps de réfléchir. J’ai envisagé plusieurs filières, avant de m’inscrire en environnement à l’Université de Lausanne. Je suis maintenant en première année de Master, après avoir réussi mon Bachelor, et mes études actuelles me plaisent énormément. Les branches théoriques sont très liées à ce qui se passe dans le monde, et c’est une formation plus généraliste.
Mon passage à l’EPFL m’a beaucoup apporté, je ne vois pas cette période comme «quatre ans de perdus», au contraire! J’ai appris une rigueur de travail qui m’a permis de poursuivre mes études avec succès à l’Unil, j’ai été membre d’associations (Forum EPFL, Xchange), j’ai travaillé comme assistante… cela m’a beaucoup appris sur le plan personnel et m’a permis de mieux cerner mes forces et mes faiblesses. Mes études actuelles me permettent entre autres de m’intéresser à prévention et à la modélisation des risques naturels via différents outils d’analyse, un domaine qui me passionne.»

Témoignage: Sandy Vibert
(Début d’études en Mathématiques à l’EPFL, puis Bachelor en Télécommunications à la HEIG-VD)

«J’ai étudié à l’EPFL de 2005 à 2007, en mathématiques, et j’ai fait un double échec en première année. Malgré mon amour pour cette branche, je crois que l’apprentissage des maths n’était pas assez appliqué pour moi, c’était trop théorique. Pourtant, je m’étais donné beaucoup de peine pour réussir. Suite à cet échec, je suis partie apprendre les langues à l’étranger, j’ai fait des petits boulots et des stages. Ensuite, je me suis réorientée à la HEIG-VD par l’année passerelle destinée aux filles, en informatique. J’ai alors réussi mon bachelor en télécommunications en trois ans sans problème. J’ai bien vécu cette réorientation, car je me suis dit que j’avais au moins essayé l’EPFL, et que si je ne l’avais pas fait, je m’en serais voulu. Et j’ai beaucoup appris durant ces deux années sur les bancs de l’EPFL: par exemple, comment rester concentrée durant des heures sur un même sujet, prendre du recul face à un problème, et développer une certaine rapidité d’esprit. Cela m’a bien servi par la suite. Mais attention, passer à une HES n’est pas plus facile, c’est très différent, car il y a beaucoup de pratique durant nos études: nous mettons la main à la pâte avec 50% de nos cours en laboratoire. Si j’avais un conseil pour les étudiants qui doivent se réorienter, ce serait de ne pas trop s’en faire et de suivre le cursus qui leur fait envie. Faire une formation ne veut pas dire qu’on fera ça toute notre vie ! Et surtout, il ne faut pas penser que perdre une année est si grave: j’ai mis trois ans avant de me réorienter à la HEIG-VD, et avec le recul, je suis très contente de mon parcours.»

Pour plus d'informations:
Centre de carrière de l’EPFL
Office cantonal d’orientation scolaire et professionnelle
Consultation psychologique du conseil et de l’orientation de l’UNIL