David Jolly : L'héritage pédagogique du mouvement de la Ville Ouverte

David Jolly : L’héritage intellectuel et pédagogique du mouvement de la Ville Ouverte

Plus de 100 étudiant·e·s issu·e·s des trois principales écoles de Suisse — l’EPFL Lausanne, l’ETHZ Zurich et l’USI Mendrisio —, architectes, ingénieur·e·s civil·e·s ou de l’environnement ont eu l’opportunité unique de contribuer à la Ville Ouverte grâce à une plateforme collaborative que nous avons bâtie ensemble entre 2013 et 2020. La Open City Research Platform, d’abord initiée de manière spontanée, a progressivement gagné l’adhésion des institutions suisses. Elle a permis, au Pórtico de los Huéspedes (situé à quelques mètres de la Casa de la Música), la création d’une œuvre évolutive et expérimentale, abordant des enjeux profondément contemporains et innovants, tant sur le plan de la construction que de la pédagogie.

Passionné par le dessin en tant qu’outil d’observation et porté par un amour infatigable pour le travail artisanal, David Jolly s’est imposé comme un pilier majeur de la dernière ère de l’Ead PUCV. Son influence auprès des nouvelles générations était sans égal. De nombreux·ses étudiant·e·s, attiré·e·s par l'expérimentation des concepts à travers l'action, ont voyagé au Chili pour découvrir une pédagogie libérée des cadres traditionnels. Avec lui, l’apprentissage se vivait en dehors des salles de classe, au cœur de la vie elle-même.

David nous a quittés, mais son esprit demeure. Toujours à l’œuvre, toujours disponible, il nous a transmis une précieuse leçon : travailler de manière progressive, en tissant un lien indéfectible entre conception et construction. Pour lui, l’action était un acte de résistance. Concevoir et construire s’imbriquaient harmonieusement, et tout cela s’enracinait dans une approche profondément humaine. Ce qui comptait avant tout, pour David, c’était la vie.

Chaque année, lors de nos visites à la Ville Ouverte, il nous présentait les avancées réalisées avec ses étudiant·e·s. Selon lui, nous fonctionnions comme un groupe de jazz : chacun·e maîtrisait son instrument, et cette liberté individuelle rendait inutile toute organisation rigide. Sa relation avec nous était exempte de hiérarchie ou d’autorité ; elle se fondait sur la générosité et l’accueil. Chaque fois que nous franchissions le seuil de sa maison, nous avions l’impression qu’elle nous appartenait.

Il nous a appris que la liberté est notre plus grande richesse, une liberté concrète et active. Ses idées ne naissaient pas de réflexions conceptuelles, mais de l’observation attentive de la vie quotidienne, toujours empreinte de poésie.

Le Pórtico de los Huéspedes incarne l’ultime chapitre de sa vie, où il s’est pleinement consacré à sa passion : être un architecte, libre de toute contrainte, dessinant, construisant, fabriquant, expérimentant et partageant son savoir.

D’un naturel toujours ouvert au dialogue, respectueux et constant, il a collaboré avec une dévotion exceptionnelle, en nous impliquant dans un véritable projet collectif. Ensemble, nous étions meilleurs que seuls.

Grâce à lui, nous avons appris à réinventer notre rapport au temps : le vivre sans le remplir, le rendre poreux pour mieux accueillir l’instant présent. Son hospitalité était un don rare, nous enveloppant d’un sentiment d’appartenance au milieu des dunes.

Merci David. À chaque coucher de soleil embrumé, nous ressentons ta présence.

Hommage de Patricia Guaita, avec des contributions d'architectes qui ont participé aux ateliers d'été en tant qu'étudiants ou assistants : Romain Dubuis, Mathis Pante et Antoine Iweins.

Archives
Open City Research Platform - ENAC Summer Workshop, 2014-2019, EPFL
Exposition “The Observación”, 2019, EPFL, Archizoom
Exposition “OPEN CITY, Thinking while building”, 2013, EPFL, Archizoom